"A travers l'Estran" est un trail de 32km assez particulier puisqu'il se déroule presque exclusivement dans l'Estran : " la partie de la cote située entre les limites extrêmes des plus hautes et des plus basses marrées!" Cette année les organisateurs proposaient une nouvelle course de 50km : E.V.E. pour "Estran vers Estran". L'occasion pour moi de confirmer que ma première expérience réussie en ultra (sur le trail du golfe 56km en juin dernier) n'était pas que le fruit d'un coup de chance ...
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sable, vase, cailloux, algues, flaques pendant 30km ... c'est ça l'Estran! |
L'association "A travers l'estran" organise tous les ans, au moments des grandes marées d'automne, un trail marin assez unique à plusieurs niveaux :
- un événement solidaire, faisant partie du challenge de la solidarité, qui récolte des fonds pour le Centre de Rééducation et de Réadaptation Fonctionnelle de Trestel (très "esprit trail")
- un parcours quasiment plat (pas de D+) mais une course pourtant considérée comme très difficile car la surface de course est hyper-technique et imprévisible puisque recouverte par la mer en moyenne 12 heures par jour!
- des paysages marins à couper le souffle, plusieurs photographes amateurs en profitent pour réaliser de superbes photos qu'ils diffusent sur le web ensuite (par exemple l'association décli'Armor ) comme les photos suivantes de 2011:
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Passage à Castel Meur en 2011, devant la célèbre "maison du littoral" |
J'ai couru à plusieurs reprise cette course de 32km, sans grande réussite car la course sur cailloux, algues, vase est quelque chose de très particulier que je maîtrise assez mal. Mais la beauté du parcours et l'esprit convivial de la course m'ont toujours poussé à y retourner ! Par contre strapping obligatoire des chevilles pour passer sans trop de risques les interminables zones de vase et de cailloux recouverts d'algues glissantes !
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Le strapping des chevilles pour prévenir tout risque d'entorse. |
28 septembre 2014, 12h15, c'est l'heure du grand départ pour les 85 trailleurs réunis sur la grande plage de Trestel. Nous voilà donc partis, sous le soleil, pour environ 5h de course dans une ambiance détendue.
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Départ de EVE le 28/09/14 à 12h15 plage de Trestel |
Les 18km additionnels de cette nouvelle course sont très roulant. Principalement constitués de petites routes, chemins d'exploitations et quelques mono-trace plus vallonnées dans le bois Riou au départ et sur le bord du Jaudy entre Tréguier et Plouguiel. La difficulté est de s'économiser au maximum (physiquement et psychologiquement) sur cette partie tout en restant attentif aux pièges du parcours. Après 1h47m et 18.5km de course j'arrive en 3ième position au port de Roche Jaune point de départ traditionnel de la course de 32km "A travers l'Estran", qui va d’ailleurs démarrer dans un instant.
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passage au petit port de Roche Jaune |
Le public et l'ambiance sont au rendez-vous de Roche Jaune, je pense alors faire une petite pose ravitaillement mais l'organisation n'a pas prévu de point de ravitaillement, juste quelques bénévoles qui nous distribue de l'eau. Je repars donc sans m'attarder et j'espère tenir jusqu'au ravitaillement de Pors Hir, vers le kilomètre 30, malgré le temps chaud. Car c'est maintenant que la course commence vraiment!
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Après une pose de quelques minutes je repars 5ième mais encore bien frais, sur une partie du parcours plus roulante qui emprunte le sentier du GR34 en zigzagant entre d'immense monolithes de granit . J'en profite pour admirer le paysage : la pointe du gouffre et la vue exceptionnelle sur la maison du littoral à Castel Meur en Plougrescant, dont l'image a souvent été utilisée pour promouvoir la Bretagne (voir la photo plus haut).
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La pointe du Gouffre |
Mais le repos est de courte durée, on attaque maintenant la traversé de l'anse de Gouermel : ici plus vraiment de chemin les signaleurs que nous croisons nous indiquent le point de passage obligatoire à viser au loin, à nous de choisir notre trajectoire entre le sable, la vase, les cailloux, les algues et les flaques ! Après une demi-heure de solitude dans l'Estran je contourne maintenant l'île de Buguéles ses immenses dunes de cailloux instables à escalader malgré des jambes de plus en plus raides. J'alterne marche et course suivant le terrain.
Puis vient l'anse de Pellinec, au fond de laquelle se trouve le dernier ravitaillement, parsemée de gués profonds qu'il faut franchir en prenant garde à ne pas être déséquilibré par le courant. Je manque de trébucher plusieurs fois dans cette zone où le sable est en plus parsemé de cailloux. Au bout de 4h12m de courses et 43km je suis encore bien mais j'ai de plus en plus de mal à lever les pieds ...
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Morlan Bars : le moulin à marée de l'île de Buguéles (début de construction fin du XVième siècle) |
Puis vient l'anse de Pellinec, au fond de laquelle se trouve le dernier ravitaillement, parsemée de gués profonds qu'il faut franchir en prenant garde à ne pas être déséquilibré par le courant. Je manque de trébucher plusieurs fois dans cette zone où le sable est en plus parsemé de cailloux. Au bout de 4h12m de courses et 43km je suis encore bien mais j'ai de plus en plus de mal à lever les pieds ...
Le gué de Pellinec |
Le plus dur est passé, étant toujours 5ième j'ai bien envie de lancer toutes mes forces dans la bataille! Je repars à bloc du ravitaillement, mais mes adducteurs sont aux limites des crampes! Il reste encore quelques passage de cailloux assez technique avant d'arriver à la plage du Royau et son "sprint final" de 3km sur une plage de sable fin et compact. Hélas c'est sur le dernier passage de cailloux à la sortie de la plage de Port Blanc que je vais chuter une troisième fois mais cette fois je vais payer cher ma faute !!! La chute commence par me provoquer une série de crampes aux cuisses, mollets et plante de pieds. Ça m'est déjà arrivé, c'est très douloureux sur le coup, on a l'impression que les muscles se déchirent, mais au bout de 2 ou 3 minutes (interminables) les jambes reviennent et souvent mieux qu'avant les crampes! Deux coureurs tentent de m'aider pendant que je suis au sol : le premier en m'étirant la jambe (merci à lui) puis un deuxième me tend la main pour m'aider à me relever (ce que je ne peux pas encore faire à ce moment là!). Quand je finis par me relever je ressens une très forte douleur sur la tête du péroné droit !! Verdict sans appel, luxation de la tête du péroné droit à trois kilomètre de l'arrivé c'est vraiment trop rageant, je pense vraiment à abandonner, mais impossible de m'y résoudre ... je repars en marchant, puis en alternant marche et course en foulées très rasantes. Heureusement que la plage du Royau est une plage de sable fin et compact sans cailloux! Je finirai donc "au courage" 8ième du 50km en 4h54m :-(
Bilan mitigé au final, certes j'ai fait une très belle course, j'ai pris du plaisir pendant 4h30m, mais une toute petite erreur en fin de course m'aura coûté très cher (et je ne parle pas de 3 place au classement ou des 10 minutes au chrono). Bilan 3 semaines sans courir, juste un peu de piscine puis une reprise à vélo jusqu'à pouvoir enfin recourir. Ça fait hélas parti des inconvénients de l'ultra trail : à peu de choses près ça passe où ça casse! Mais C'est aussi dans ces moments là qu'on apprend le plus de choses :
- faire face à l'imprévu, car un ultra reste une aventure imprévisible
- faire des choix en urgence entre deux options dont une mauvaise et une catastrophique!
- savoir faire la part des choses entre aller au bout de ses rêves et mettre en danger sa santé.
Je suis impressionné. Sur les photos on voit un coureur en bleu, puis en rouge. Est-ce toi ?
RépondreSupprimerLes photos où j'apparais avec un maillot bleu (un camelbak rouge/gris et des chaussures jaunes) datent de 2011, sur les photos de l'édition 2014 j'apparais avec un maillot rouge (une casquette, un camelbak noir et des chaussures noir) . Cette année je vais tenter le trail du bout du monde : 57km autour de la pointe saint-Mathieu ... je ne manquerai pas de vous faire un compte-rendu :-)
Supprimerhttp://www.trailduboutdumonde.com/